Provins, dans l’Est de l’Île-de-France, est une cité médiévale remarquable. Ancien castrum romain, Provins, qui avait le droit de battre sa propre monnaie, était la 3e ville de France, après Paris et Rouen. D’anciennes demeures et bâtisses conservées, comme la Maison romane (la plus ancienne maison de la ville 10e-11e siècles), la grange aux dîmes ou l’Hostellerie de la Croix d’Or (la plus ancienne de France, dont la façade date de 1264-1270), des remparts impressionnants (bâtis de 1226 à 1314, sur 1200 mètres de long, avec 22 tours) et une tour fortifiée remarquable, la Tour César, le seul donjon octogonal à base carrée, qui date du 12e siècle, témoignent encore aujourd’hui de ce riche passé…
Les souterrains qui serpentent sous la vieille ville ajoutent encore à l’atmosphère particulière du lieu. Il s’agissait à l’origine de carrières dont les matériaux étaient utilisés dans l’industrie drapière : la terre à foulon que l’on extrayait des entrailles de la ville servait à dégraisser la laine, un peu comme du savon. Les galeries servirent ensuite d’entrepôts pour les marchands durant les foires du Moyen Âge (trois foires sur l’année, la Foire de May, la Foire de Saint Ayoul et la Foire de Saint Martin).
Aux 18e et 19e siècles, les lieux sont investis par des groupes contraints à la clandestinité, notamment les francs-maçons qui y ont trouvé refuge au moment de la révolution française : ils y ont d’ailleurs laissé de nombreux graffitis. Menacée par les lois de la Terreur, la loge locale, l’Heureuse Alliance, fondée en mars 1783 à l’initiative de militaires et d’ecclésiastiques, avait dû quitter l’auberge où elle s’était toujours réunie, pour se replier dans ces espaces secrets… Aux suspicions des révolutionnaires, ont succédé les accusations de complot maçonnique, qui aurait favorisé le déclenchement du processus révolutionnaire. Une théorie que relaient Augustin Barruel dans ses Mémoires pour servir à l’histoire du jacobinisme (1797-1799), et John Robison dans Les preuves d’une conspiration contre l’ensemble des religions et des gouvernements d’Europe (1797). Les francs-maçons sont à nouveau obligés de se réunir en secret. Depuis ces temps troublés, un mystère persiste : le grand-maître de la loge à cette époque, un certain Génisson, a disparu sans laisser de traces. Se serait-il perdu dans l’incroyable dédale ?
Quelques livres pour aller plus loin :
Sur Provins :
Félix Bourquelot, Histoire de Provins
François Verdier, Provins
François Verdier, Un prieuré au temps des foires de Champagne. Saint Ayoul de Provins
Christian Paris, Provins (Mémoires en images)
Sur les souterrains : Arnaud Gourmand, France souterraine insolite et extraordinaire
Sur les francs-maçons en France :
Histoire des francs-maçons en France, sous la direction de Daniel Ligou
Roger Dachez, Histoire de la franc-maçonnerie française
Alain Bauer et Roger Dachez, Nouvelle histoire des francs-maçons en France, des origines à nos jours
Et deux romans
Eric Giacometti et Jacques Ravenne, Le Règne des Illuminati – un roman qui évoque la traque des francs-maçons sous la Terreur
Umberto Eco, Le pendule de Foucault, qui tire notamment son inspiration de l’histoire et de la configuration de la cité champenoise.
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