En 315 et en 317, l’empereur Constantin a émis deux actes d’une importance capitale. Le premier est une confession dans laquelle le premier empereur chrétien expose sa foi, une foi qu’il tient du pape Sylvestre dont il est l’obligé depuis que le saint homme l’a guéri de la lèpre : l’épisode est d’ailleurs corroboré par les Acta Sylvestri, un recueil hagiographique daté du 5e siècle. La seconde pièce est bien plus étonnante et sensationnelle. C’est une donation dans laquelle le souverain énumère les privilèges accordés au pape en signe de reconnaissance : la pleine propriété de biens comme le palais du Latran, ainsi que les églises du Latran, de Saint-Pierre et de Saint-Paul-hors-les-murs ; la primauté sur toutes les Eglises, en Occident comme en Orient ; des biens dans diverses provinces ; les insignes impériaux et sénatoriaux ; et d’une manière générale, la souveraineté incontestée sur Rome, l’Italie et tout l’Occident. Rien que ça…
Incroyable, n’est-ce pas ?
Le hic, c’est que l’existence du second texte, la Donation de Constantin, n’est pas attestée avant le milieu du 9e siècle. Des contestations ne s’élèvent qu’à partir du 12e siècle : on parle d’imposture – le pape avait-il le droit de se défaire de sa souveraineté temporelle dans les mains de Charlemagne ? – et même d’une action patente de l’Antéchrist dans le monde. Il faut attendre le 15e siècle pour que l’humaniste Lorenzo Valla entreprenne une critique textuelle du document, pour le dater du 8e siècle, au plus tôt. S’agit-il d’un faux carolingien, élaboré « pour faire vrai » dans la ligne des privilèges accordés par Pépin le Bref et ses successeurs sur le trône impérial d’Occident ? Il semble bien, d’après le vocabulaire utilisé et les mobiles probables du faussaire, que le texte émane de la papauté, à une époque où l’évêque de Rome cherchait à supplanter tous les autres patriarcats. Cependant, force est de reconnaître que les rois carolingiens y trouvaient aussi leur compte…
Quelques livres pour aller plus loin :
Lorenzo Valla, Sur la donation de Constantin, à lui faussement attribuée et mensongère
Dictionnaire historique de la papauté
Jacques Braibant et Alain Leclercq, L’histoire noire de l’Eglise
Et aussi des romans :
Shantale Cyr et Glenn Keays, L’héritier. La donation de Constantin
Steve Berry, Le dernier secret du Vatican – très récent (2019), inspiré par Constantin et son action en tant qu’empereur chrétien
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