Polar classique – Moriarty, d’Anthony Horowitz

Autant vous le dire tout de suite : je n’ai encore jamais rien lu d’aussi déconcertant !

Tout commence en 1891, à Reichenbach, ce petit village de Suisse où Sherlock Holmes et son ennemi juré, le professeur Moriarty, auraient trouvé la mort. C’est pour interroger le professeur au sujet d’une lettre qu’il aurait reçue de Clarence Devereux, l’insaisissable chef de la pègre américaine, que Frederick Chase, un détective de l’agence Pinkerton à New York, a fait le voyage jusqu’en Europe. Mais il est trop tard : au lieu des informations qu’il espérait, Chase ne recueille que la vision d’un cadavre, le seul qu’on ait trouvé au pied des chutes près desquelles Holmes et Moriarty se sont affrontés. Un cadavre, sans doute celui de Moriarty, puisqu’à l’évidence, ce n’est pas Holmes. L’ennui, c’est qu’à part Holmes lui-même, personne n’a jamais vu le professeur, du moins de manière à pouvoir l’identifier formellement. Un cadavre, donc, qui ne peut plus rien apprendre à qui que ce soit. Peut-être que si, en réalité : grâce à Athelney Jones, un inspecteur dépêché par Scotland Yard et formé aux méthodes de Sherlock Holmes, Chase découvre sur le corps de Moriarty une lettre codée qui va conduire les deux hommes de Reichenbach à Londres. Commence alors une traque sans relâche : le « Napoléon du crime » a disparu, sa place est vacante et si Devereux a bien contacté Moriarty pour une alliance « transatlantique », la nouvelle de la mort du professeur risque bien de déclencher un déferlement de violence par laquelle Devereux s’imposerait comme un successeur naturel de celui qui aurait pu devenir son associé. D’ailleurs les lieutenants de Devereux sont déjà dans la place… Mais ils tombent, l’un après l’autre, mystérieusement assassinés. Torture, enlèvement, manipulation, attentat : Chase et Jones remontent lentement la piste de Devereux, toujours plus près du danger, jusqu’à ce que…

Non ! Vous n’y songiez pas sérieusement ? Vous ne pensiez pas que j’allais vous raconter la fin ? Si ? Eh bien, non ! Croyez-moi : vous avez tout à gagner à aller la découvrir vous-même, cette chute si étonnante que j’en suis réellement tombée à la renverse. Un truc de dingue ! A n’en pas croire ses yeux…

Au premier abord, ce roman ne présente rien qui puisse réellement retenir un lecteur qui ne serait pas déjà fan du détective de Baker Street. Le postulat de départ est relativement enthousiasmant, voire prometteur : le professeur est mort et on va s’intéresser à ce qui s’est passé à Londres directement après la dissolution de sa bande. Une manière d’amener le projecteur sur ces trois années qui séparent Le Dernier Problème de Reichenbach de La Maison vide, qui signe le retour de Holmes aux affaires, puisque, comme vous le savez sans doute, ce dernier n’est pas mort en Suisse. Alors, pourquoi pas ?

Très vite, cependant, même quand on aime l’univers holmésien, on se demande ce qu’on fait là. Ce n’est pas mal, mais ce n’est pas ça. C’est un classique dans lequel Jones et Chase – un bon duo, au demeurant –  « jouent » à être Holmes et Watson, et ça sonne faux. Les personnages sont assez attachants, et l’intrigue est bien ficelée, si on aime ce genre-là et qu’on est capable de faire abstraction d’un rythme parfois un peu poussif. Il y a quand même de l’action, du style, des éléments qui rappellent Conan Doyle, comme l’étonnante rencontre avec John Clay (Les Têtes Rouges) et aussi cette manière d’opposer la Grande-Bretagne au Nouveau Monde. Mais rien à faire, ça ne décolle pas ! Après La Maison de Soie, je m’attendais à beaucoup mieux que ça. Je ne me suis jamais vue dans cet état : persuadée d’avoir attrapé un tout bon livre – genre de ce qui s’est fait de mieux depuis l’invention du salami en tranches – et obligée de me motiver chaque jour pour en lire quelques pages, comme mes élèves autrefois avec les lectures que je leur imposais, luttant constamment contre la tentation de laisser tomber et de passer à autre chose… jusqu’à cette fin ! L’avant-dernier chapitre est une véritable bombe : jamais aucun livre ne m’avait fait cet effet-là ! Les mots me manquent et rien que d’y repenser, j’en suis encore chamboulée. C’est aussi la première fois que ma patience face à un récit qui me donnait l’impression de s’enliser est récompensée aussi magnifiquement.

Un pastiche « diesel » qui a l’air de ne jamais avoir vraiment démarré avant de se transformer, moins de cent pages avant la fin, en un bolide fulgurant qui vous laisse sur place !

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