Jack Bernstein, spécialiste en cryptologie, grand maître d’échecs et aussi président directeur général d’IntelliSoft, une multinationale de l’informatique, apprend que sa fille unique Lara, dont il est sans nouvelles depuis trois ans, se trouvait à bord du vol commercial 320 Francfort-New York qui vient d’exploser en plein vol. Alors que l’enquête s’oriente vers une piste terroriste, Jack reçoit un message crypté en hébreu ancien : un certain Simon lui donne rendez-vous à l’église Notre-Dame de France, à Londres. Sur cet ancien site templier, sous la fresque de Jean Cocteau représentant la passion du Christ, le mystérieux Simon lui révèle que les hommes qui ont placé la bombe dans l’avion n’avaient qu’une seule cible, Lara, et un seul objectif : empêcher qu’elle puisse dévoiler à son père la vérité sur une confrérie secrète, une secte dans laquelle la jeune femme avait vécu pendant un temps et dont les mystérieux desseins menacent les fondements mêmes de l’Eglise. Seule la résolution d’une énigme historique pourra permettre à Jack, qui dispose par sa société de ressources informatiques illimitées, de déjouer les plans des assassins de sa fille et de récupérer le petit garçon qu’elle a mis au monde quelques mois avant sa mort, ainsi que l’attestent les preuves médico-légales. Avec les premiers indices, disséminés dans trois tableaux – la fresque de Jean Cocteau, ainsi que deux œuvres de Léonard de Vinci, la Cène et la Vierge aux Rochers – c’est une formidable partie d’échecs historique et religieuse qui s’engage.
Dans l’ensemble, Adrian Dawson nous propose là un thriller relativement efficace : une construction classique, une structure stimulante et déclinée à la manière d’une partie d’échecs, un suspense articulé autour d’une course contre la montre et, à foison, des mystères bibliques touchant à l’histoire cachée de Jésus et aux textes des Evangiles eux-mêmes. Très honnêtement, même si la recette des polars ésotériques dans la ligne du Da Vinci Code ou de La Formule de Dieu est éprouvée – un peu trop, en fait : c’est vrai qu’à force, cela sent le filon commercial – il faut saluer l’ingénieuse pirouette théologico-biblique qui sous-tend l’intrigue : arriver à trouver un fil qui dépasse de la pelote et qu’on peut tirer pour en faire quelque chose de convaincant, c’est l’une des étapes les plus ardues dans la réalisation d’un polar de ce genre-là. Regardons la réalité en face : sous cet aspect, il est impossible d’être absolument original. Et pour une fois, le secret qui sort du puits n’est pas un mariage passé sous silence ou une descendance royale.
Il y a pourtant quelques bémols… Le résultat n’est pas aussi terrifiant qu’on pouvait l’espérer avec un argument pareil, surtout en commençant par l’explosion d’un avion en vol. A lire le récit de la fuite de Lara, qui ne cesse de regarder par-dessus son épaule, on sent que ça va mal finir… L’accroche est très réussie, mais le niveau retombe trop vite pour ne jamais vraiment remonter. Les rebondissements sont nombreux et bien menés, mais il leur manque un je-ne-sais-quoi qui prendrait aux tripes. Est-ce lié à la personnalité du héros, un mélange de Steve Jobs et de Bill Gates ? Difficile d’avoir une réelle empathie pour lui… Ce n’est pas le genre de personnage pour qui on donnerait sa vie, et pourtant on meurt beaucoup autour de lui. Je regrette de balancer un pavé pareil dans la mare, mais je n’ai jamais craint une seconde pour la vie de l’enfant… On reste « en surface », comme des spectateurs, et c’est vraiment dommage ! Et puis il y a la question du texte lui-même : l’écriture est assez fluide, mais il y a ce recours constant au jargon biblico-technologique qui semble cher à l’auteur. Tant mieux pour lui, mais quant à moi, la littéraire pur jus, je suis restée très souvent sur le bas-côté de la route, un peu isolée à cause de ces notions qui me sont parfaitement étrangères. Ceci dit, j’aime que les romans que je lis m’instruisent dans des domaines variés et étonnants, mais j’ai souffert d’une présentation sèche et finalement hermétique.
Une recette infaillible pour ne pas lâcher le fil d’une action très dense et savoir si Jack parvient à retrouver son petit-fils consisterait idéalement à lire ce livre d’une traite, sans traîner, pour rester dans le rythme. Evidemment, c’est une brique de plus de 600 pages, mais c’est la seule solution. Après un démarrage sur les chapeaux de roues, il faut un long moment pour discerner quelques directions dans l’intrigue… Il n’y a pas de mal à rentabiliser au maximum ses efforts !
Une dernière suggestion, relevée dans un des commentaires d’un grand groupe de vente en ligne : l’auteur aurait tout à gagner à insérer à la fin de son roman un chapitre à la Steve Berry, quelques pages dans lesquelles il reprendrait tous les faits évoqués en faisant la part de la réalité et de la fiction. De quoi contenter les lecteurs qui, pour la plupart, aiment pouvoir aller plus loin.
Il paraît que cet opus n’est pas le meilleur de cet auteur… Voilà qui sent le deuxième service ! Sous peu, promis !
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