Policier classique – La mystérieuse affaire de Styles, d’Agatha Christie

Lorsque la richissime Emily Inglethorp est retrouvée empoisonnée dans son manoir de Styles, les soupçons se portent rapidement sur son jeune mari, Alfred Inglethorp. Mais le verdict paraît trop évident au capitaine Hastings, ami de la famille en séjour à Style Court, qui décide de faire appel à Hercule Poirot, son ami belge réfugié en Angleterre pendant le temps de la guerre – la Première guerre mondiale. A qui profite le crime ? Au mari, bien sûr, mais il y a aussi les beaux-enfants d’Emily – les deux fils du précédent mari de la dame – qui vivaient sous la menace permanente de se trouver déshérités… Il y a encore Mary, l’épouse du beau-fils aîné, une ombrageuse jeune femme qui paraît bien décidée à imposer sa marche à la maisonnée, et notamment à son mari infidèle. Cynthia, la protégée d’Emily, pourrait bien avoir conçu des projets criminels en découvrant que sa bienfaitrice a bel et bien oublié de la coucher sur son testament. Pourquoi pas Evelyn, l’amie de toujours qui n’avait pas hésité à dire son fait à la défunte, amoureuse d’un homme beaucoup plus jeune qu’elle… Tous auraient pu se procurer la strychnine qui a servi à tuer Emily dans une chambre close de l’intérieur. Les indices sont maigres et Hercule Poirot va devoir déployer tout son génie pour résoudre cette ténébreuse affaire.

On a tous notre « Agatha Christie » préféré… Je ne sais pas pour vous, mais pour moi, c’est celui-là ! Je l’ai lu au moins une trentaine de fois avec toujours le même plaisir ineffable… Jamais la plus petite pointe de lassitude : on a beau faire, on y revient toujours et à chaque fois, on a l’impression de retrouver de vieilles connaissances… En fait, c’est la somme de tout ce que j’aime : une ambiance sombre et mystérieuse à souhait, le charme désuet d’un manoir perdu dans la campagne anglaise, un background historique en béton armé et une intrigue old school, classique parmi les classiques, avec ce thème du meurtre commis dans une chambre fermée de l’intérieur. Loin devant le Double assassinat de la Rue Morgue d’Egdar Allan Poe et Le ruban moucheté d’Arthur Conan Doyle, c’est de loin la meilleure déclinaison de ce schéma qui continue de faire fantasmer les écrivains aujourd’hui encore… Expliquer l’inexplicable, quel challenge ! Et de la jeune auteur qu’était Agatha Christie, que dire sinon que c’était son premier roman, un roman qu’elle a dû défendre âprement auprès des éditeurs… Une émotion particulière se dégage de l’ensemble : aujourd’hui encore, c’est comme si celle qui est devenue la Reine du Crime se présentait en personne devant nous, presque un siècle après la première parution, avec son premier bébé dans les bras. Un style déjà magistralement affirmé et des personnages brossés avec un réalisme évident. Magique !

Et puis il y a Hercule Poirot qui apparaît pour la toute première fois et qui déjà mène la danse jusqu’à la grande scène de la révélation finale. Du grand art ! La transposition en téléfilm avec David Suchet dans le rôle du petit Belge aux drôles de moustaches est tout bonnement époustouflante : on dirait que les personnages ont jailli des pages de ce roman culte pour prendre chair sous nos yeux.

D’aucuns pointeront la source d’inspiration évidente chez Arthur Conan Doyle – le détective génial et son acolyte, un homme honnête aux moyens intellectuels plus modestes, genre de faire-valoir attachant, comme une espèce de doudou destiné à faire paraître l’enquêteur vedette encore plus merveilleux qu’il ne l’est. Il y a davantage à tirer du duo Poirot-Hastings, que le second rend singulièrement proche et accessible, et même d’Hercule Poirot lui-même. La Première guerre mondiale a montré que la science et le progrès n’étaient pas forcément à l’avantage de l’humanité et que les avancées pouvaient tout aussi bien produire l’horreur des armes de destruction massive que les outils de développement de la société humaine. Alors, plutôt que les indices collectés par Sherlock Holmes, c’est une plongée au cœur des passions et des mobiles à laquelle nous convie le petit Belge à l’aspect si ridicule qu’il en paraît inoffensif… Un petit côté Columbo, le genre de héros que les coupables ne prennent pas la peine de calculer… Pour leur plus grand malheur !

Un incontournable !

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