1er siècle avant Jésus-Christ. C’est la sixième année de la Guerre des Gaules, et César ordonne que toute forme de vie en Eburonie, c’est-à-dire le territoire situé au nord de la Meuse, de Huy à Liège, soit anéantie. Rolant, un jeune guerrier rème, se trouve justement dans cette région qui vient d’être ravagée une première fois par les troupes romaines en lutte contre Ambiorix : il a quitté sa Champagne natale parce qu’il ne supportait pas la paix conclue par les anciens de son peuple avec César. A ce premier motif, s’ajoute son prochain mariage avec une jeune Eburonne, Alana, qu’il est venu chercher et qu’il emmène avec lui à travers un pays cette fois complètement dévasté, jusqu’à Reims. C’est alors qu’il est mis en relation avec Vercingétorix, à la veille de la bataille d’Alésia. Mais ce que le jeune Rème a aussi emporté avec lui des rives de la Meuse, c’est un secret qu’on lui a confié : un parchemin où figure l’emplacement du trésor des druides.
Né le 15 mars 1939 à Marneffe, en Belgique, dans la Hesbaye hutoise, Pierre Hazette est agrégé de lettres de l’Université de Liège, où il a travaillé comme assistant jusqu’en 1963. Dans les années 1970, il devient attaché de cabinet au Ministère de l’Enseignement avant d’entrer en politique, d’abord au niveau local, à Braives, puis à la Région wallonne et à la Communauté française. De 1999 à 2004, il est Ministre de la Communauté française chargé de l’Enseignement, des Arts et des Lettres. Il est Grand Officier de l’Ordre de Léopold.
Dans Haïr César ? Pierre Hazette part d’une anomalie qu’il a détectée dans le Commentaire sur la Guerre des Gaules. Il s’agit du double génocide que le conquérant romain inflige au royaume éburon.
Ainsi, Livre VI, 33-34 : « Il [César] avait partagé son armée : Titus Labiénus, avec trois légions, reçoit l’ordre de partir vers l’Océan, dans la partie du pays qui touche aux Ménapes ; il envoie Caïus Trébonius, avec le même nombre de légions, ravager la contrée qui est contiguë aux Atuatuques ; quant à lui, prenant les trois légions restantes, il décide de marcher (…) vers l’extrémité des Ardennes, où on disait qu’Ambiorix s’était retiré avec quelques cavaliers. (…) Il n’y avait dans le pays, comme nous l’avons dit plus haut, aucune troupe régulière, pas de place forte, pas de garnison prête à se défendre, mais une population qui s’était disséminée de tous côtés. Partout où une vallée secrète, un lieu boisé, un marécage d’accès difficile offrait quelque espoir de protection ou de salut, on y avait cherché asile. Ces retraites, les indigènes qui habitaient dans leur voisinage les connaissaient bien, et il fallait observer une grande prudence, non point pour la sûreté des troupes dans leur ensemble (car réunies, elles ne pouvaient courir aucun danger de la part d’une population terrifiée et dispersée), mais pour la sûreté individuelle des hommes, ce qui, dans une certaine mesure, importait au salut de l’armée. En effet, beaucoup étaient attirés à de longues distances par l’appât du butin, et comme les chemins, dans les bois, étaient incertains et peu visibles, ils ne pouvaient marcher en troupe. Voulait-on en finir et exterminer cette race de brigands, il fallait fractionner l’armée en un grand nombre de détachements et disperser les troupes ; voulait-on garder les manipules groupés autour de leurs enseignes, selon la règle ordinairement suivie par les armées romaines, la nature même des lieux où se tenaient les Barbares leur était une protection, et ils ne manquaient pas d’audace pour dresser de petites embuscades et envelopper les isolés. On agissait avec toute la prudence dont il était possible d’user dans des conjonctures aussi délicates (…) César envoie des messagers aux peuples voisins : il excite chez eux l’espoir du butin et appelle tout le monde au pillage des Eburons : il aimait mieux exposer aux dangers de cette guerre de forêts des Gaulois plutôt que des légionnaires, et il voulait en même temps qu’en punition d’un tel forfait cette grande invasion anéantît la race des Eburons et leur nom même. Des forces nombreuses accoururent bientôt de toutes parts ».
Et un peu plus loin, toujours Livre VI, 43 : « César, reprenant sa campagne de dévastation, disperse de tous côtés un fort contingent de cavalerie qu’il avait tiré des cités voisines. On incendiait les villages, tous les bâtiments isolés qu’on apercevait, on massacrait le bétail, partout on faisait du butin ; toute cette multitude de bêtes et d’hommes consommait les céréales, sans compter que la saison avancée et les pluies les avaient couchées : en sorte que, même si quelques-uns avaient pu pour le moment échapper en se cachant, on voyait bien qu’ils devraient, une fois l’armée partie, succomber à la disette. Souvent avec une cavalerie battant le pays dans tous les sens en si nombreux détachements, il arriva qu’on fît des prisonniers qui venaient de voir passer Ambiorix en fuite, et le cherchaient des yeux, assurant qu’il n’était pas encore tout à fait hors de vue : on espérait alors l’atteindre et on faisait des efforts infinis ; soutenu par l’idée d’entrer dans les bonnes grâces de César, on dépassait presque la limite des forces humaines, et toujours il s’en fallait d’un rien pour qu’on atteignît le but tant désiré. Lui cependant trouvait des cachettes ou des bois épais qui le dérobaient, et à la faveur de la nuit, il gagnait d’autres contrées, dans une direction nouvelles, sans autre escorte que quatre cavaliers, à qui seuls il osait confier sa vie ».
Pourquoi un second génocide quand, de l’aveu même de César, le premier massacre n’avait laissé aucune trace de vie sur la terre gauloise ? Pierre Hazette ne croit pas au prétexte avancé par César : la traque d’Ambiorix ne peut justifier un tel déploiement de force. Le plus vraisemblable, c’est la quête de l’or, qui guide le chef des armées romaines. Mais César échoue et le trésor des Eburons, dont le secret a été confié à Rolant, semble bien lui échapper…
Sous la plume vive de Pierre Hazette, la fiction s’emploie à combler les lacunes de l’Histoire, pour le plus grand bonheur des passionnés.
Paru en 2011, Haïr César ? connaît une suite, Perdition, qui est sortie en 2013. Pour une prochaine publication sur ce blog…
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