Désormais chef de la brigade romaine du patrimoine artistique, à la place du général Bottando parti à la retraite, Flavia di Stefano se débat avec les aléas du pouvoir et le poids de ses nouvelles responsabilités. Et ce matin-là, c’est une fameuse tuile qui lui tombe sur le coin de la figure : un tableau prêté par le Louvre a disparu au cours d’une opération rocambolesque. Les enjeux sont de taille, et le Premier Ministre exige naturellement d’être informé… Quelle poisse ! « Si les hommes politiques peuvent vous gâcher la journée, les ministres peuvent vous gâcher la semaine », avait un jour déclaré Bottando. « Et les Premiers ministres ? », avait demandé Flavia. « Les Premiers ministres ? Ah ! la vie entière… » Il semble que le voleur, en plus d’être un incorrigible farceur, soit très proche des hautes sphères de la politique italienne. Pauvre Flavia ! Avec tous ces petits malaises qui l’accablent depuis quelques jours et qui lui font craindre un prochain ulcère à l’estomac, elle aurait bien besoin de l’aide de son ancien patron, le très sage Bottando qui avait mené sa barque pendant des décennies au milieu de la fosse aux serpents, et de son jeune mari, Jonathan Argyll, docteur en histoire de l’art et catastrophe ambulante dotée d’un flair étonnant. Mais le premier qui profite d’un repos bien mérité est aux abonnés absents, et le second arpente la Toscane, sur les traces de sa dernière marotte, une Madone, propriété de Bottando, dont il voudrait retracer l’histoire. Cerise sur le gâteau, Mary Verney, que tout le monde prend pour une paisible citoyenne britannique alors qu’elle est en réalité la plus grande et la plus habile voleuse d’œuvres d’art de tous les temps, est de retour sous le ciel d’Italie.
Même si le texte lui-même est impeccable, la traduction semble avoir cependant exercé ses ravages dans le titre… Le secret de la Vierge à l’Enfant était à l’origine The Immaculate Deception. Difficile à rendre en français, mais tellement plus porteur, n’est-il pas ?
Quel plaisir de retrouver, pour la dernière fois, Flavia – même si elle est passablement sur les nerfs – et son mari légitime, Jonathan « La Gaffe » qui n’en finit pas de mettre les deux pieds dans le plat, ainsi que l’autre « couple », Bottando, le vieux général à la retraite et Mary Verney, la voleuse qu’on n’a jamais réellement pu prendre la main dans le sac… Sauf que… Non, non, pas de spoil ! J’ai tendance, a posteriori, à trouver que Flavia, patronne survoltée et malgré elle d’un service que les autorités rêvent toujours de démanteler, se taille la part du lion dans ce dernier opus, mais en y regardant de plus près, ce n’est qu’un sentiment de femme (il faut lire le livre pour comprendre l’allusion sur laquelle je ne m’éteindrai pas) : on retrouve à nouveau un partage très équitable de la distribution – et donc l’équilibre narratif qui est le sceau et la marque de la série.
En plus de ces personnages attachants, l’enquête elle-même est passionnante : plongeant dans les sombres secrets du passé, elle tend à éclairer d’un jour nouveau certaines vérités que l’on croyait acquises. Une enquête qui s’inscrit dans la douloureuse histoire de l’Italie, avec les mouvements terroristes, la corruption des autorités… Un passé qui ne semble pas si lointain, quand on y réfléchit… Heureusement qu’il y a l’humour anglais, décapant à souhait, et, de Rome aux confins de la Toscane, le soleil italien avec tout ce qu’il évoque pour mâtiner tout cela et conférer à l’ensemble une sorte de légèreté jubilatoire.
Le secret de la Vierge à l’Enfant constitue une fin surprenante et délectable, en forme de happy end drôlement troussé, pour cette série policière historique sur fond d’histoire de l’art – les enquêtes conjointes du trio le plus improbable de l’histoire de la littérature – improbable, mais si efficace et tellement drôle !
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