Le colonel Protheroe a pris sa retraite à St. Mary Mead, où il réside avec sa femme et sa fille. Mais l’ombrageux militaire a le don de se disputer avec tout le monde et de se rendre impopulaire dans ce petit coin d’Angleterre où il ne se passe jamais rien. Sa dernière victime n’est autre que le pasteur, Leonard Clement, qu’il a rudement interpelé afin qu’il le laisse accéder aux comptes de l’église, pour s’assurer qu’il n’y a aucun détournement de fonds. C’est lors de sa visite au presbytère, alors que le pasteur retenu par ses obligations est en retard pour leur réunion de travail sur la comptabilité, que le colonel est assassiné, dans le bureau même de l’ecclésiastique. Au fait, personne ne regrette vraiment l’odieux bonhomme qui passait sa vie à chercher des poux dans la tête de son prochain, et la manière dont il a trépassé est finalement bien plus embarrassante que tragique. Il n’empêche que les ragots vont bon train et très vite, les soupçons de la police s’orientent dans d’autres directions, avec l’aide d’une charmante vieille demoiselle, la voisine du presbytère, la délicieuse Miss Jane Marple, qui, forte de sa connaissance de la nature humaine, mène sa propre enquête. Qui a assassiné le colonel Protheroe ?
Publié en octobre 1930 sous le titre Murder at the Vicarage et en France deux ans plus tard, c’est le premier roman de la reine du Crime qui met en scène la détective amateur Jane Marple, archétype de la vieille demoiselle anglaise et antithèse de Hercule Poirot. La perspicacité faite femme avait déjà fait son apparition dans des nouvelles plus tard reprises dans le recueil Miss Marple au Club du Mardi. En réalité, ce personnage se développe sur la base d’une autre demoiselle à l’intelligence vive, Miss Caroline Sheppard, la propre sœur du médecin narrateur du Meurtre de Roger Ackroyd. Voilà une drôle de petite idée qu’Agatha Christie avait pris le temps de laisser germer avant de la coucher sur le papier, pour le plus grand plaisir des lecteurs. L’imagination des écrivains n’est décidément pas étanche, et certaines créations semblent déborder de vitalité au point d’acquérir pratiquement le droit de vivre leur propre vie. A n’en pas douter, Miss Marple est du nombre.
Un roman étonnant, cette Affaire Protheroe, à plus d’un titre. D’abord parce que le narrateur à la première personne est le pasteur – le premier suspect du meurtre, en fait, puisque le crime est commis sous son toit à un moment où il aurait dû se trouver avec la victime – un proche, mais en aucun cas un satellite de la pétillante Miss Marple, ce qui permet d’éviter les pièges du « Watson-like ». Autre curiosité : l’unité de lieu, que l’on retrouve dans d’autres romans de la Reine du Crime, mais qui est ici poussé dans une espèce de paroxysme, comme s’il s’agissait d’une figure de style. En lisant (et en relisant) L’affaire Protheroe, je me dis souvent que cela pourrait faire la base d’une magnifique pièce de théâtre… Ce qui fut le cas en 1949 ! Voilà une matière qui mériterait qu’on s’y replonge !
L’affaire Protheroe, roman au charme suranné mais indiscutable, a aussi fait l’objet de plusieurs adaptations à la télévision, avec un succès jamais démenti : en 1986, L’affaire Protheroe, dans la série Miss Marple de BBC One avec Joan Hickson ; en 2004, Meurtre au presbytère, dans la série Miss Marple d’ITV avec Géraldine McEwan ; et enfin en 2016, L’affaire Protheroe, dans Les Petits Meurtres d’Agatha Christie, avec Samuel Labarthe, Blandine Bellavoir et Elodie Frenck, un trio qui remplace Miss Marple à l’écran pour le meilleur… et le meilleur !
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