Policier classique – Témoin muet, d’Agatha Christie

Rien de tel pour me consoler de mes récents démêlés avec un certain réseau qu’un bon classique, lu au coin du feu… Idéal pour dissiper les angoisses et les insomnies ! Et pourtant…

Toute la maisonnée est contrariée après l’accident qui a failli coûter la vie à tante Emily : une chute sur la balle du chien malencontreusement abandonnée dans l’escalier. Mais plus elle y pense, plus Miss Emily Arundell est convaincue qu’un de ses proches essaie de l’éliminer. Elle confie ses soupçons à Hercule Poirot dans une lettre datée du 17 avril, mais celui-ci ne la reçoit que le 28 juin… Entretemps, Miss Arundell, dont tout le monde connaissait la santé fragile, est bel et bien morte. Le certificat de décès a été délivré, et tout indique une mort naturelle. C’est la gouvernante Minnie Lawson qui a hérité de toute la fortune de Miss Arundell : la famille n’est pas contente, mais bon ! Il faudra bien que ces gens s’y fassent… Mais le doute persiste. La vieille demoiselle avait-elle raison de se croire en danger ? Serait-il possible qu’un membre de son entourage ait précipité sa fin ?

Une enquête d’Hercule Poirot comme on les aime, avec le capitaine Hastings en back stage – sorte de clone de John Watson tout aussi sympathique et admiratif du grand homme dont il est la groupie – et aussi Bob, un fox-terrier qui n’est pas si muet que le pensait le meurtrier. Car oui, la vieille demoiselle, qui est issue d’une ancienne et honorable lignée, a été assassinée… C’est la Reine du Crime et du Mystère, c’est Agatha Christie à sa grande époque (1937) : alors, forcément, c’est un crime, et tant mieux ! Rien à voir avec ces écrivains et scénaristes qui vous mettent en appétit avec un argument à faire baver d’envie et finissent sur un pétard mouillé – un suicide ou, pire, un accident. Et puis, il y a le petit côté piquant qui consiste à faire de la victime la cliente même d’Hercule Poirot, celle qui par sa prescience et sa lettre mandate Poirot et lui confère toute sa légitimité d’action. On en retire le sentiment d’une machine infernale, un plan tracé qui se joue inéluctablement sous nos yeux jusqu’à ce que… C’est bien joué, vraiment très bien joué ! D’autant plus que c’est la première fois qu’Agatha Christie, qui avait conçu un premier jet de cette intrigue dans une nouvelle intitulée L’incident de la balle du chien,  entreprend de lancer Hercule Poirot dans un cold case – elle y prendra goût puisqu’elle recommencera en 1942 lors de la rédaction de Cinq petits cochons. Un procédé efficace et subtil, mené de main de maître, comme toujours, avec toujours cette invitation tacite au lecteur et à ses petites cellules grises : « Allez, qui trouvera la solution le premier ? »… Old school, mais si stimulant !

Comme souvent chez Agatha Christie, il y a beaucoup de personnages, mais comme toujours, on ne s’y perd pas.  Chacun a sa place dans cette intrigue classique, si l’on veut, mais captivante, de la première à la dernière page. Et la famille, quelle famille ! Du genre à avoir envie de passer Noël seul(e) chez soi ! Quelle bande de rapaces ! Il en faut de la sagacité, dans ce huis-clos, pour faire la part entre la simple médiocrité, répandue et écoeurante, et les intentions réellement criminelles.  Même si on plonge directement au cœur de l’action, certains passages sont un peu longuets, mais il faut bien faire conférer un corps solide à cette trame et donner à l’ambiance so british l’occasion de se déployer… C’est à nouveau un coup gagnant.

Pour ce classique intemporel, deux très belles adaptations télévisées… En 1996, Témoin muet, de la série Hercule Poirot d’ITV, avec David Suchet, impérial en Hercule Poirot, et Hugh Fraser, inénarrable capitaine Hastings. Et en 2013, dans Les Petits Meurtres d’Agatha Christie, avec Samuel Labarthe, Elodie Frenck et Blandine Bellavoir : un trio exceptionnel, un classique revisité et jubilatoire !

Pour conclure, un clin d’œil à ceux et celles qui comme moi adorent les chiens… Le roman est dédicacé à Peter, qu’Agatha Christie qualifie de plus fidèle ami et de plus merveilleux compagnon… Son fox-terrier, qui a servi de modèle à Bob.

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