6 décembre 1491. La France célèbre le mariage de son roi, le jeune Charles VIII, avec la belle Anne de Bretagne. Le couple, très uni, ne tarde pas à procréer, mais aucun des enfants ne survit : fausses couches, enfants morts nés ou décédés en bas âge. Lorsque le roi meurt le 7 avril 1498, la couronne échoit au duc d’Orléans, qui devient roi sous le nom de Louis XII. Afin d’empêcher que la Bretagne n’échappe à la couronne française, le nouveau souverain fait annuler en toute hâte son mariage avec Jeanne de France, fille de Louis XI, pour épouser Anne, qu’il aime en secret depuis longtemps. L’union est célébrée le 14 janvier 1499. Dès le mois d’octobre de la même année, la reine Anne met au monde une petite fille, prénommée Claude, et qui survit aux premières années. Afin d’affermir la position de son fils François, duc d’Angoulême et héritier présomptif jusqu’à la naissance d’un Dauphin, Louise de Savoie sollicite et obtient pour lui la main de la petite princesse.
Mais comme au temps de son premier mariage, la reine Anne enchaîne les grossesses (au moins cinq en 1500, 1503, 1505, 1508 et 1509) qui se soldent par des tragédies, pour finalement accoucher d’une vigoureuse petite Renée le 25 octobre 1510. Anne meurt le 9 janvier 1514, et Louis XII qui rêve toujours d’un héritier de son sang, se remarie avec la jeune et jolie Mary d’Angleterre, mais l’union reste stérile. Le roi décède en janvier 1515. Le duc d’Angoulême est désormais le roi François 1er, avec à ses côtés la frêle et très féconde reine Claude qui meurt en 1524 après avoir mis au monde sept enfants.
Quelle est cette étrange malédiction qui semble s’être attachée à tous les petits princes de France, jusqu’à la naissance du prince François, en 1518 ? Parce qu’il y en a eu quelques-uns, avec cette tragique répétition des prénoms qui sautent d’une tête à l’autre. D’abord, les fils de Charles VIII et Anne : Charles-Orland (1492-1495), François (1493), Charles (1496) et François (1497-1498). Puis les fils de Louis XII et Anne : un garçon mort né en 1500, François (1503), et encore un garçon non nommé qui n’a vécu que quelques jours en 1512. Par ailleurs, nous avons deux femmes : d’une part, Louise de Savoie qui semble n’avoir jamais douté du destin royal de son fils François, et d’autre part, Anne de Bretagne, qui s’était opposée à l’union de Claude avec le jeune duc d’Angoulême.
Faut-il voir la main du destin dans cette triste série de décès ? Ou l’effet d’actes délibérés ? Le mystère reste entier…
Quelques livres pour aller plus loin :
Simone Bertière, Les reines de France au temps des Valois
Philippe Tourault, Anne de Bretagne
Georges Minois, Anne de Bretagne
Didier Le Fur, Anne de Bretagne : miroir d’une reine. Historiographie d’un mythe
Pour en finir avec Anne de Bretagne. Actes de la journée d’étude organisée aux Archives départementales de la Loire-Atlantique le 25 mai 2002 (Colloque)
Pierre Chotard, Anne de Bretagne : une histoire, un mythe
Jean Jacquart, François 1er
Robert Jean Knecht, Un prince de la Renaissance : François 1er et son royaume
Didier Le Fur, François 1er
Aubrée David-Chapy, Anne de France, Louis de Savoie : inventions d’un pouvoir au féminin
Pascal Brioist, Laure Fagnart et Cédric Michon, Louise de Savoie (1476-1531)
Une reine sans couronne ? Louise de Savoie, mère de François 1er (collectif)
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