Alors qu’elle cueille des fleurs dans une prairie de Sicile, Perséphone, fille de Déméter, est enlevée par Hadès qui veut l’épouser et en faire la reine des Enfers. Dans les temps qui suivent, Déméter, folle d’inquiétude, délaisse les champs dont les cultures cessent de croître et se consacre à la recherche de sa fille. Elle erre ainsi en Grèce, sous les traits d’une mendiante, lorsqu’elle arrive à Eleusis où elle est reçue par le roi et ses filles. Reconnaissante des bons soins qu’ils lui prodiguent, elle leur dévoile son identité et leur révèle ses mystères, « les beaux et augustes rites qu’on ne peut ni transgresser ni divulguer ». Les princes d’Eleusis sont désormais chargés de l’administration de ce culte.
Au-delà du mythe, l’étymologie montre que les mystères d’Eleusis ont une origine crétoise et qu’ils se sont développés à l’époque préhistorique avant que la cité ne soit englobée dans le synoecisme d’Athènes et que les rites n’acquièrent un statut panhellénique. C’était une pratique à initiation, avec grades et promotions, dont le monopole était détenu par les membres de familles aristocratiques et sacerdotales. Les mystères d’Eleusis synthétisent la tradition des rites secrets et l’expression d’une religion populaire et paysanne, issue d’un culte agraire. S’y ajoute la dimension particulière d’une promesse d’immortalité, puisque l’initiation créait une société d’élus. C’est précisément cette facette des mystères qui les rendait si attrayants aux candidats à l’admission au sein des cercles d’initiés. Comme la divulgation des rites était strictement défendue et qu’aucun auteur n’a trahi ce secret, aucun écrit ne documente avec précision les cérémonies.
On a pensé que les rites secrets constituaient une sorte de drame symbolique sacré qui provoquait un choc chez ceux qui y assistaient et qui leur permettait ainsi d’intégrer le présent au transcendant. D’abord réservés aux élites, les mystères sont devenus ensuite accessible aux plus humbles, à condition qu’ils n’aient pas de sang sur les mains. Les philosophes modernes ont tenté de lier les mystères à la gestion du désir refoulé et à la compréhension du sens véridique de la vie. Certains auteurs ont même supposé que les initiés consommaient des substances hallucinogènes, notamment des fermentations contenant de l’ergot de seigle.
Des mystères qui restent entiers et qui n’ont pas fini d’inspirer…
Quelques livres pour aller plus loin :
Une source : Hymne homérique à Déméter
Walter Burkert, Les cultes à mystères dans l’Antiquité
Paul Foucart, Les mystères d’Eleusis
Des romans :
Eliette Abécassis, Le palimpseste d’Archimède
André Fraigneau, Le songe de l’Empereur
Alain Page, Le secret des Compagnons d’Eleusis
Will Adams, Le secret d’Eleusis
Orson Sinedy, Ordo ab chao
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