La Sainte Tunique d’Argenteuil.

Cette tunique de dessous en laine de couleur violacée, sorte de grand maillot de corps avec des manches, serait la tunique sans couture filée et tissée par la Vierge Marie, que le Christ portait lors de sa Passion. Selon l’Evangile, ses bourreaux la lui avaient enlevée  au moment de la crucifixion, la tirant au sort pour ne pas la découper au moment où ils se sont partagé les vêtements du condamné. Ce vêtement ordinaire, fabriqué avec des matériaux bon marché, est cependant remarquable à cause de la perfection du travail : c’est un sous-vêtement de laine, sorte de chemise longue descendant jusqu’au-dessous des genoux, une « chitone » spécialité artisanale de la Galilée, souvent tissée par les mères de famille modestes sur le petit métier à tisser familial démontable. Ces artisanes aux doigts agiles mettaient un point d’honneur à réaliser une tunique sans couture, tissée d’une seule pièce avec des manches qui n’étaient pas rapportées. La tunique conservée aujourd’hui à Argenteuil présente des taches de sang issues de la flagellation.

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D’abord conservée en Palestine, comme d’autres reliques christiques, la tunique fut transférée à Byzance où elle fut vénérée. L’impératrice Irène (752-803), régente de l’empire byzantin après la mort de son mari, en fit don à Charlemagne à l’époque où ce dernier devint empereur d’Occident. La tunique est alors confiée à la garde de Théodrade, l’une des filles du souverain, qui était abbesse du monastère bénédictin d’Argenteuil. Pour la préserver des atteintes – pillages, incendies – les religieuses décidèrent d’emmurer la relique qui sombra dans l’oubli jusqu’en 1152, à la faveur d’importants travaux de restauration entrepris au monastère d’Argenteuil, qui abritait désormais des moines. Le culte de la tunique est à nouveau institué par une charte d’Hugues d’Amiens, archevêque de Rouen, donnée en 1156 : l’engouement ne faiblit pas jusqu’au 18e siècle. En 1793, le curé Ozet décide de couper la tunique en morceaux enterrés à différents endroits, dans l’espoir que la plupart d’entre eux pourront survivre à la furie révolutionnaire. Après la Révolution, les morceaux sont réassemblés à l’à-peu-près, conférant à la tunique son aspect actuel.

A partir de la fin du 19e siècle, le culte de la tunique tombe dans une telle désuétude qu’en 1983, la relique est volée et restituée quelques mois plus tard contre une rançon : le plus interpellant, c’est que le larcin n’a pas remarqué avant un long moment… Pire : un certain nombre de sources concernant la tunique, comme la charte de 1156, ont disparu, victimes de l’incurie du personnel qui en avait la garde.

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Les analyses ont montré qu’il s’agissait en effet d’une tunique inconsutile telle qu’on les faisait à l’époque du Christ, qui plus est kasher, c’est-à-dire sans que la laine ne soit mêlée d’aucune substance végétale. L’observation du textile a démontré une origine moyen-orientale, avec une torsion du fil correspondant à un mode de tissage en usage dès le 1er siècle avant Jésus-Christ. La coloration, due à la garance, est fixée par de l’alun, une technique largement utilisée dans l’Antiquité. Les analyses sanguines correspondent à celles qui ont été menées sur les autres reliques christiques – le linceul de Turin et le suaire d’Oviedo : le groupe de type AB, les traces suivant les schémas décrits par les Evangiles, avec une mention spéciale pour les liquides qui montrent une hématidrose, la sueur de sang décrite par saint Luc. D’autres recherches ont démontré l’origine moyen-orientale de la tunique : l’analyse des poussières, l’examen des pollens et même les traces d’opiacée qui correspondraient à la boisson sédative que l’on faisait absorber aux condamnés pour atténuer leurs souffrances.

La datation au Carbone 14 n’a, comme pour le linceul de Turin et le suaire d’Oviedo, clôturé aucune question de manière définitive.

Quelques livres pour aller plus loin :

Jean Maurice Clercq, Les grandes reliques du Christ. Synthèse et concordances des dernières études scientifiques. La tunique d’Argenteuil, le suaire d’Oviedo, le linceul de Turin

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Jean-Christian Petitfils, Jésus

Jésus Petitfils

Jean Maurice Delvals, Une si humble et si sainte tunique

Pierre Dor, La tunique d’Argenteuil et ses prétendues rivales

François Le Quéré, La Sainte Tunique d’Argenteuil. Histoire et examen de l’authenticité de la tunique sans couture du Christ

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André Marion et Gérard Lucotte, Le linceul de Turin et la tunique d’Argenteuil

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Vittorio Messori, Il a souffert sous Ponce Pilate

Gérard Lucotte et Philippe Bornet, Sanguis Christi. Sang du Christ. Une enquête sur la tunique d’Argenteuil

Grzegorz Gorny et Janusz Rosikon, Témoins du mystère. Enquête sur les reliques du Christ

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Victor Loupan et Alain Noël, Enquête sur la mort de Jésus

Dominique Barbe, Irène de Byzance, la femme empereur

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Une source : Histoire de la Sainte Tunique d’Argenteuil. Manuscrit inédit d’un bénédictin de Saint-Maur (1894)

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